Comment traduire une activité humaine, comme parcourir un kilomètre en voiture ou acheter un ordinateur, en émissions de gaz à effet de serre ? C’est tout l’objectif des facteurs d’émission : des coefficients qui permettent de convertir une donnée d’activité en émissions de CO2 équivalent (CO2e).
Un outil clé pour la mesure carbone
Un facteur d’émission exprime la quantité de gaz à effet de serre émise par unité d’activité : par exemple, en kgCO2e par kilowattheure consommé, par litre de carburant utilisé ou par euro dépensé. Il est indispensable pour réaliser un bilan carbone ou une analyse du cycle de vie (ACV), et permet d’estimer les impacts d’une activité sur le climat.
Toutes les émissions ne se valent pas : certains gaz comme le méthane (CH4) ou le protoxyde d’azote (N2O) ont un pouvoir de réchauffement bien supérieur au CO2. Pour comparer ces émissions entre elles, on utilise le PRG (potentiel de réchauffement global) qui permet d’exprimer chaque gaz en équivalent CO2.
Deux types de facteurs d’émission
- Facteur physique : lié à un flux physique (kWh, litres, tonnes…). C’est l’approche la plus précise, recommandée dès que les données sont disponibles.
- Facteur monétaire : utilisé quand aucune donnée physique n’est accessible. Il exprime les émissions par euro dépensé, en kgCO2e/€. Moins précis, mais utile pour les postes comme les services ou les achats indirects.
Des bases de données de référence
Les facteurs d’émission sont publiés dans de grandes bases de données, généralistes ou spécialisées selon les secteurs d’activité :
- En France, l’ADEME propose la Base Empreinte®, qui regroupe plus de 5 000 facteurs issus des anciennes bases IMPACTS® et Carbone®. Elle intègre progressivement des données issues de la base Ecoinvent®, référence internationale en ACV.
- Pour les secteurs spécifiques, des bases dédiées existent : AGRIBALYSE® pour l’agroalimentaire, INIES pour le bâtiment et les matériaux de construction.
- À l’international, Exiobase® et Ecoinvent® restent des standards largement utilisés, bien que majoritairement payants.
La qualité des données varie selon les sources, l’année, la méthodologie ou le niveau de spécificité sectorielle. Il est donc essentiel de documenter l’origine, les hypothèses et les limites du facteur utilisé.
Exemple concret : pour une voiture thermique consommant 6 litres de carburant aux 100 km, le facteur d’émission standard de l’ADEME (Base Empreinte®) est d’environ 2,7 kgCO2e/litre de SP95. Parcourir 100 km émet donc environ 16,2 kgCO2e.
Source : SDES 2023
Comment sont-ils calculés ?
Les facteurs d’émission sont issus de différentes méthodes de calcul :
- Analyses de cycle de vie (ACV),
- Inventaires nationaux (comme ceux transmis au GIEC),
- Données empiriques ou statistiques sectorielles,
- Modélisations scientifiques.
Chaque méthode présente un niveau d’incertitude : modèles imparfaits, données obsolètes, approximations ou erreurs de mesure. D’où l’importance de connaître les limites des données utilisées.
Le bon facteur, au bon endroit
Choisir le bon facteur d’émission, c’est garantir la fiabilité de son calcul carbone.
- Dès que possible, privilégier les données physiques.
- Utiliser les bases reconnues et documenter ses hypothèses.
- Garder en tête que la précision ne doit pas ralentir l’action : mieux vaut un calcul imparfait mais utilisé, qu’une estimation parfaite mais inutilisée.
Les facteurs d’émission sont des passerelles entre l’activité et son impact. Bien les choisir, c’est rendre visibles les leviers de transformation.